À partir de la fin de 2017 ou du début de 2018, le volume des dépôts à vue aux USA a cessé d'augmenter pour se stabiliser. Précisons déjà que depuis la crise financière de 2007-2008, ces dépôts sont intégralement couverts (et même au-delà) par les réserves excédentaires. Celles-ci ont cependant commencé à entamer une baisse régulière (tout en restant suffisantes) depuis le moment qui nous intéresse, pour atteindre une réduction de 700 milliards en septembre 2019. Sur la même période, la quantité de cash en circulation a augmenté de pas loin de 200 milliards, tandis que la vélocité de M1 s'est stabilisée (ce qui peut indiquer davantage de monnaie entre les mains des consommateurs et autres criminels, comparativement à l'usage de monnaie sous forme scripturale) après avoir chuté depuis 2008.
https://fred.stlouisfed.org/series/WDDSL
https://fred.stlouisfed.org/series/EXCSRESNW
https://fred.stlouisfed.org/series/CURRCIR
https://fred.stlouisfed.org/series/M1V
Où sont passés les 500 milliards restants ? Pas dans les réserves obligatoires.
https://fred.stlouisfed.org/series/FDHBFRBN
L'ensemble des dépôts auprès des banques commerciales a progressé d'environ 1 200 milliards sur la période, tandis que 1 300 milliards de crédits ont été émis par les mêmes banques.
https://fred.stlouisfed.org/series/DPSACBW027SBOG
https://fred.stlouisfed.org/series/TOTBKCR
Environ 400 milliards sont entrés dans les "institutional money funds", spécialisés dans les placements liquides, avec pour clientèle des investisseurs institutionnels (États, entreprises, fiduciaires).
https://fred.stlouisfed.org/series/WIMFSL
https://en.wikipedia.org/wiki/Money_market_fund#Institutional_money_fund
https://www.investopedia.com/terms/m/money-marketfund.asp
https://www.gold-eagle.com/article/hyper-inflation-capital-destruction%E2%80%A6gold-and-silver
Ceci laisse supposer que les banques commerciales se sont débarrassées d'une partie de leurs réserves excédentaires pour les transformer en bons du Trésor (dont la banque centrale s'est désistée au même moment de 400 milliards).
https://fred.stlouisfed.org/series/REQRESNS
Ce faisant elles auraient pu un peu réduire la part des actifs liquides de la Fed, sauf que cette dernière a réussi à refourguer environ 300 milliards en MBS (et encore plus d'une centaine avant d'en racheter pour le confinement).
https://fred.stlouisfed.org/series/WSHOMCB
Le risque d'une recapitalisation (par l'État) de la banque centrale contient la menace d'une perte d'indépendance de cette dernière, impliquant un financement facilité du déficit public. Avec des postes de dépense comme l'armée et l'éducation, le risque inflationniste existe (si ces dépenses ne retirent pas de l'emploi non-productif ailleurs, ou au contraire si elles enlèvent du travail productif (gare à l'hystérésis du chômage); dans cette perspective le travail commercial, s'il aboutit à des importations nettes, peut être considéré comme productif - reste à calculer dans quelle mesure), à moins d'une expansion de la production. Moins de chômeurs signifie une plus grande masse salariale ; certes il est concevable que l'épargne augmente, mais une hausse du cours de l'immobilier peut signifier une plus grande impression de richesse et davantage de consommation. Et aux USA (où par ailleurs la bourse est une alternative à l'immobilier, avec un effet similaire sur la consommation), la grande disponibilité du crédit à la consommation (due au rôle de monnaie de réserve du dollar ?) fait qu'une progression de la masse salariale peut amener à plus de ces emprunts. L'inflation elle-même pousse à vendre ses créances pour investir en actions, ce qui implique une réallocation des ressources en faveur du secteur privé.
La crise du Covid-19 vient faire exploser de nouveau le bilan de la Fed. La part de dette fédérale dans ses actifs reste d'environ 65 %. Le bilan de la banque centrale avait cependant déjà entamé une remontée dès septembre 2019.